La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) est régulièrement saisie pour des cas de violences conjugales. Mais cette dernière est-elle limitée aux violences physiques de la part d’un conjoint ? Les magistrats ont retenu que la violence pouvait revêtir des formes très diverses allant de la pression psychologique au harcèlement moral. Le monde actuel étant de plus en plus exposé aux dérives numériques, il est évident que ce support peut être une plateforme pour des actes dits de cyberviolence. Loin d‘être banals, ces actes sont de plus en plus fréquents sous des aspects très variés : violations informatiques de la vie privée, intrusion dans l’ordinateur de la victime, récupération frauduleuse de mots de passe et entrées forcées, partage et manipulation des données et des images, communication de données intimes…
Afin d’illustrer ce propos, nous prendrons l’exemple d’une femme, originaire de Roumanie, qui a déposé plainte à l’encontre de son mari pour violences domestiques. L’histoire commence, malheureusement, de manière assez classique : La plaignante explique avoir subi des menaces de mort et présente un certificat médical constatant de nombreuses lésions suite à des actes de violences physiques. Une deuxième plainte est déposée, peu de temps après, où la victime affirme reçu de nouvelles pressions et violences afin de la dissuader de retirer la plainte.
A la suite du divorce, la plaignante réclame une perquisition des outils numériques de la famille expliquant que son ex-époux avait abusivement consulté ses comptes électroniques – dont le compte Facebook – et qu’il avait fait des copies de ses conversations privées, de ses documents et de ses photos. Elle dépose alors une troisième plainte pour violation du secret de ses correspondances.
Aucune instruction ne sera menée, le Parquet décidant de classer l’affaire : Ce dernier retient l’évidence de menaces prononcées par l’ex-époux mais son comportement n’est pas jugé suffisamment grave pour être qualifié d’infraction. Concernant la plainte pour violation du secret des correspondances, les magistrats classent aussi sans suite en retenant que les faits sont trop anciens pour faire l’objet d’une qualification pénale.
Interprétation juridique des faits de violence conjugale par la CEDH
Suite à la trop grande clémence dont aurait bénéficié le mari indélicat, la plaignante décide alors de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme afin de faire reconnaître son préjudice. Les juges du fonds se penchent tout d’abord sur les faits de mauvais traitements et de violence conjugale et retiennent que la justice roumaine a manqué de discernement, face à la gravité des actes, pour assurer la protection de la plaignante. Après études des griefs. Il est arrêté que les autorités n’ont pas abordé les faits litigieux du point de vue de la violence conjugale. En effet, l’enquête n’a pas pris en compte les spécificités des faits de violences domestiques telles que reconnues dans la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Les conclusions du tribunal roumain n’aurait pas eu, en l’espèce, un effet dissuasif suffisant pour empêcher les actes de violence conjugale entre les intéressés. De plus, si aucune autorité interne n’a contesté la gravité des lésions subies par la plaignante, aucun élément d’enquête n’a cependant permis d’identifier la personne responsable. Aucune investigation, ni aucun élément de preuve n’a été recherché afin d’identifier l’origine des lésions subies par l’intéressée. Dans une affaire qui concerne des actes allégués de violence familiale, il revenait aux autorités d’enquête de prendre les mesures nécessaires pour éclaircir les circonstances de la cause.
Interprétation juridique de violence conjugale sous forme numérique par la CEDH
La CEDH retient la réalité des faits de cyberviolence, en reconnaissant celle-ci comme un aspect de la violence à l’encontre des femmes et pouvant se présenter sous des formes variées : violations informatiques de la vie privée, intrusion dans l’ordinateur de la victime, partage, manipulation des données et des images…La Cour observe que dans le contexte de la violence domestique, la cybersurveillance est souvent le fait des partenaires intimes. Ainsi, la Cour accepte l’argument de la plaignante en retenant que des actes tels que surveiller, accéder ou sauvegarder sans droit la correspondance du conjoint peuvent être pris en compte lorsque les autorités nationales enquêtent sur des faits de violence conjugale.
Or, les diligences minimales n’ont pas été menées pour vérifier ce point de droit. Les autorités nationales se voient reprochées de n’avoir pas procédé à des actes de procédure afin de recueillir des preuves permettant d’établir la réalité des faits ou leur qualification juridique. La CEDH explique que les autorités roumaines « ont fait preuve d’un formalisme excessif en écartant tout rapport avec les faits de violence conjugale que la requérante avait déjà portés à leur attention, et elles ont ainsi failli à prendre en considération les diverses formes que peut prendre la violence conjugale. »
C’est donc un nouveau front juridique qui s’ouvre en cas d’espionnage du conjoint : la violence domestique en général, et la violence à l’égard des femmes en particulier, peuvent être invoquées par la victime. Cette décision fait aujourd’hui jurisprudence.
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Article : Espionner les mails de son conjoint est-il un acte de violence conjugale ?
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