Logiciel de traçabilité de l’activité d’un salarié : un moyen illicite de contrôle et de preuve

Logiciel de traçabilité d’un salarié : moyen illicite de contrôle et de preuve

Dans un arrêt du 11 décembre 2019, la Chambre sociale de la Cour de cassation confirme qu’il convient d’écarter des débats les documents résultant d’un moyen de preuve illicite. En l’espèce un outil de traçabilité, utilisé par un établissement de crédit, destiné au contrôle des opérations internes. Le logiciel permettait aussi de restituer l’ensemble des consultations effectuées par un employé et était utilisé par l’employeur afin de vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille. La Cour de cassation s’est fondée sur l’article L. 2323-32 du Code du travail, selon lequel le comité d’entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés.

Un moyen de preuve jugé illicite

Dans les faits, un salarié est convoqué à un entretien préalable à son licenciement et mis à pied à titre conservatoire. Il a été licencié pour faute grave en décembre 2012. Il a contesté son licenciement devant la juridiction prud’homale qui l’a débouté. Il a ensuite interjeté appel du jugement. L’employeur reprochait à son salarié d’avoir consulté des comptes de clients qui ne faisaient pas partie de son portefeuille. Ces consultations auraient été détectées par le logiciel de l’entreprise utilisé afin d’assurer la sécurité des données bancaires. L’employeur tentait de démontrer la faute grave de son salarié au moyen de ce logiciel. Devant la Cour d’appel, le salarié soutenait que ces éléments n’ont pas été recueillis au moyen de preuve licite. En effet, si tout établissement de crédit doit se doter d’un système de contrôle interne à des fins de contrôle des opérations, un tel outil permet aussi de restituer l’ensemble des consultations effectuées par un employé. « A ce titre, l’employeur qui utilise l’outil de traçabilité afin de vérifier si son salarié procède à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille aurait dû informer et consulter le comité d’entreprise sur l’utilisation du dispositif, en application de l’article L. 2323-47 du code du travail, ce qu’il n’a pas fait ».

Si le comité d’entreprise « a bien été informé de la mise en place de cette traçabilité, la lecture du procès-verbal ne permet pas de retrouver l’information ». Il soutient aussi que le compte-rendu relatif à la lutte contre la fraude ne donne que des informations générales et aucune sur le contrôle du travail des salariés. Considérant ce moyen de preuve illicite, il doit donc être écarté puisque l’employeur échoue à rapporter la preuve de la faute grave qu’il invoque. Ainsi, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse. La Cour d’appel a suivi le raisonnement du salarié, en écartant le moyen de preuve jugé illicite et a considéré que la preuve de la faute grave n’était pas établie par l’employeur.

L’employeur a formé un pourvoi : Un établissement de crédit est libre, sans avoir à en informer préalablement le comité d’entreprise, d’utiliser un système informatique destiné à assurer la sécurité des données bancaires, serait-il doté d’un système de traçabilité, pour vérifier si un salarié a procédé à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille. Selon les juges du fond cet outil permettait aussi de restituer l’ensemble des consultations effectuées par un employé et que dès lors, l’employeur aurait dû informer le comité d’entreprise avant d’utiliser le dispositif litigieux pour vérifier si le salarié procédait à des consultations autres que celles des clients de son portefeuille ». Conformément aux dispositions de l’article L. 2323-32 du code du travail, le comité d’entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés. Position qui a été approuvée par la Cour de cassation.

Sur la validité d’un procédé de surveillance des salariés

Le présent arrêt rappelle les décisions déjà prises sur l’étendue du contrôle et de la surveillance des salariés par leur employeur. Si l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller l’activité de son personnel durant le temps de travail, il ne peut mettre en œuvre un dispositif de contrôle qui n’a pas fait l’objet, préalablement à son introduction, d’une information et d’une consultation du comité d’entreprise. Il a déjà été jugé que constituait un moyen de preuve illicite l’enregistrement du salarié par le système de vidéo surveillance de la clientèle mis en place par l’employeur, qui est également utilisé pour contrôler ses salariés sans information et consultation préalables du comité d’entreprise (Chambre sociale 20 sept. 2018, n° 16- 26482; Chambre sociale, 15 mai 2001). Il est important de rappeler que, lorsque le procédé de surveillance des salariés entraîne un traitement des données personnelles des salariés, celui-ci doit être porté préalablement à leur connaissance. Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance.

Et de nouvelles obligations se sont ajoutées avec le RGPD, qui impose aux employeurs souhaitant mettre en place un procédé de contrôle de ses salariés, en plus de respecter les principes de finalité, de proportionnalité, de limitation du système de contrôle, le respect des droits des personnes sur leurs données. Ces dernières doivent être informées, comme le préconise la CNIL, de la mise en œuvre d’un dispositif de surveillance, selon les modalités les plus appropriées en fonction de l’organisation de l’entreprise (charte d’utilisation des outils informatiques, note de service, avenant au contrat de travail, mention d’information sur un intranet, courrier d’information, bulletin de paye).

En fonction des technologies utilisé pour le contrôle (vidéosurveillance, géolocalisation, écoutes, enregistrements téléphoniques…) des règles particulières peuvent s’appliquer. En somme, les employeurs doivent demeurer prudents, aussi bien lorsqu’ils décident de mettre en place un procédé de surveillance des salariés que dans le choix des preuves pour établir l’existence d’une faute grave d’un salarié. (Cass. Soc. 11 déc. 2019 n°18-11792)

Article complet publié par Maître Dalila MADJID

 

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