La recevabilité d’un rapport de détective privé en droit français

Notre article de cette semaine traite de la recevabilité d’un rapport de détective privé en droit français. Bonne lecture 😉 

Recevabilité d’un rapport de détective privé en droit français

La recevabilité d’un rapport de détective privé a déjà fait, par le passé, l’objet de débats houleux. En effet, la question de l’objectivité des conclusions et observations par l’enquêteur, payé par la partie adverse, a maintes fois été sujet à caution.

C’était oublié un peu rapidement qu’un détective privé est un professionnel du droit, agrémenté et déclaré, dont les constats sont nécessairement soumis à une indépendance lui permettant d’agir de manière neutre et purement factuelle.

L’article 9 du Code de procédure civile dispose qu’il « incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de ses prétentions ». Si n’importe quel citoyen est en mesure de délivrer un acte ordinaire tel qu’un témoignage ou une attestation 202, il est en revanche un domaine strictement réservé aux privés : les enquêtes et investigations de terrain. Pour des raisons évidentes de légalité, les filatures, les surveillances, et plus généralement tout acte d’enquête, doivent être des actions strictement encadrées et proportionnées aux intérêts poursuivis. Seul un professionnel agrée comme le détective privé aura le recul nécessaire pour apprécier l’opportunité ou non d’un tel acte.

L’ensemble de ses activités faisant la plupart du temps l’objet d’une consignation écrite dans des rapports, ces derniers sont-ils susceptibles de contestations ? Intéressons-nous donc à la question de la recevabilité d’un rapport de détective privé ainsi qu’à sa force probante devant les tribunaux.

Les contestations relatives à la recevabilité d’un rapport de détective privé

Comme évoqué en préambule, l’argumentaire majeur de la partie adverse tenait au manque de neutralité du détective privé qui, payé pour fournir ses conclusions, voyait donc son objectivité amoindrie. Cependant, la position des magistrats a rapidement été fixée dans l’un des plus célèbres arrêts relatifs à la profession d’enquêteur privé. La Cour de Cassation consacre pour la première fois la recevabilité d’un rapport de détective privé dans son arrêt de principe du 7 novembre 1962 « BRUNET CONTRE GARNIER » (Cass 2Ème chambre civile – n° 1020 – 12 octobre 1977). En l’espèce une décision d’appel avait été rendue en se fondant sur les seules constations d’un détective privé. Face à l’argumentaire de la partie adverse, justifiant du manque de neutralité de l’enquêteur eu égard au règlement de sa prestation, la Cour de Cassation tranche de manière non équivoque en retenant que « le rapport de surveillance privée est admis et ne peut être rejeté au seul motif que le détective était payé »

De manière plus actuelle, la Cour d’appel de Caen, dans un arrêt du 4 avril 2002, a d’ailleurs rappelé que « les constatations effectuées par un enquêteur privé sont admissibles en justice selon les mêmes modalités et sous les mêmes réserves que tout mode de preuve. »

Bien évidemment, et la position des juges du fonds ne saurait faire l’objet d’une quelconque remise en cause en l’espèce, un rapport peut être déclaré irrecevable si les informations consignées ont été obtenues de façon illicite ou déloyale. Retenons en effet qu’un enquêteur privé est soumis au principe de loyauté dans l’administration de la preuve et que chacun de ses actes d’enquête doit respecter des conditions de légalité évidentes. A ceci s’ajoute aussi le principe de la proportionnalité des investigations menées eu égard aux intérêts poursuivis. Dans un arrêt du 25 février 2016 (15–12403) la Cour de cassation rappelle que « le droit de la preuve ne peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée qu’à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi. »

Ainsi, la moindre intrusion non justifiée dans la vie privée de la personne suivie, mais aussi toutes menaces, ruses, violences, intimidations, manœuvres ou encore introductions frauduleuses dans des fichiers informatisés pourra faire l’objet d’une contestation. L’auteur de ces actes pourra en corollaire être poursuivi et engager sa responsabilité civile ou pénale. De plus, la partie demanderesse voire l’avocat de cette dernière pourront eux aussi se voir poursuivis pour recel d’informations obtenues de façon illégale.

Nuançons néanmoins ce dernier point puisque dans la majeure partie des affaires au civil, les débats n’étant pas publics, il a été communément admis que la communication d’un rapport de surveillance d’un des époux à son conjoint ne constitue pas une atteinte à l’intimité de la vie privée dans la mesure où les avocats de la partie ainsi que les juges sont tenus au secret professionnel.

En matière pénale cette fois-ci, toute preuve est considérée comme recevable sans distinction de la condition de légalité. La Cour de cassation l’a rappelé dans son arrêt du 6 avril 1944 (Cass. Crim) disposant qu’ « aucune disposition légale ne permet au juge répressif d’écarter les moyens de preuves produits par les parties, au seul motif qu’ils auraient été obtenus de façon illicite. Il lui appartient seulement d’en apprécier la valeur probante ». La question de la valeur probante est d’ailleurs un point qui doit particulièrement retenir notre attention concernant la recevabilité d’un rapport de détective privé.

 

Recevabilité d’un rapport de détective privé : les contestations relatives à la valeur probante 

Un détective privé n’est pas un officier ministériel. Contrairement à un huissier de justice, il n’est par conséquent aucunement dépositaire d’une parcelle de l’autorité publique. Quelle est par conséquent la force probante de son rapport ?

De manière générale, il est impossible de pouvoir quantifier la valeur d’une preuve apportée par un détective privé. Comme tout élément versé comme pièce de procédure, elle dispose d’une valeur soumise au pouvoir d’appréciation du juge qui aura la charge de l’examiner. En effet, la Cour de cassation a retenu dans son arrêt du 13 novembre 1974 (2ème Chambre Civ.) qu’il « entre en effet dans le pouvoir souverain des juges du fond d’apprécier un rapport de police privée dans sa valeur et dans sa portée ». Depuis cet arrêt, nombre de positions ont pourtant été prises par les juges avec une clarté pas forcément évidente. La finalité reste que les juges sont libres de retenir, ou non, le rapport d’enquête comme pièce de procédure aux débats. Globalement, retenons qu’ils accueillent de manière plutôt favorable les constatations d’un enquêteur privé pour autant que ces dernières soient légales, loyales et proportionnées. Il est en revanche arrivé que face à des observations imprécises, insuffisantes ou tout simplement erronées, le juge décide d’écarter des débats cet éléments de preuves. Plus grave encore serait la question de la partialité de l’enquêteur dans la rédaction de ses constatations.

Il est cependant très rare que des décisions soient rendues sur la seule base d’un rapport de détective. Ce dernier sera, le plus souvent, considéré comme un élément de preuve supplémentaire, susceptible de permettre au juge de renforcer son intime conviction, notamment avec l’apport de photographies permettant d’illustrer les observations avec un « impact » visuel intéressant.

Dernier cas intéressant : le recueil de témoignages par un détective privé. Dans le cadre d’un dossier, il est fréquent qu’un détective privé puisse entendre une personne sur un évènement précis. Dans cette hypothèse, la personne pourra alors réaliser une attestation écrite qui sera jointe au rapport comme complément mais le détective pourra aussi décider de consigner l’entretien dans son rapport. Cette position, bien que faite en toute transparence, est plus délicate car la valeur probante des termes employés pourrait être sujette à caution. En cas de changement de position de la personne, l’enquêteur devra alors prendre les précautions nécessaires pour ne pas se voir accuser de faux témoignage ou de subornation de témoins.

Recevabilité d’un rapport de détective privé : conclusion

En définitive, si l’utilité du rapport de détective ne souffre aucune contestation, il apparait néanmoins fondamental pour l’avocat d’en examiner avec la plus grande précision les tenants et les aboutissants : type d’informations mentionnées, conditions du recueil de ces dernières, légalité et loyauté du rapport d’enquête, portée juridique…

Comme tout élément, un rapport d’enquête privée doit donc respecter les critères de droit commun en matière de recevabilité de la preuve. Si les juges accueillent plutôt favorablement les observations d’un détective privé, leur travail doit cependant obéir à des principes et des conditions très particulières, d’autant plus lorsque, contrairement à un citoyen ordinaire, cette preuve émane d’un professionnel agrée comme le détective privé.

Envie d’en savoir plus sur la recevabilité d’un rapport de détective privé en droit français ?

Lisez l’excellent article de M. Jean Paul Branlard : http://www.detectives-prives.com/jurisprudence-rapport-detective.html

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Recevabilité d’un rapport de détective privé en droit français

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